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Politique- Laurent Gbagbo devant les Wê: “Le coûte que coûte n’existe pas en politique”

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Laurent Gbagbo a reçu samedi 28 août 2021, dans son village, Mama, dans le département de Gagnoa, une forte délégation de militants et sympathisants Wê, population autochtone des régions du Guémon et du Cavally. Ces régions, surtout celle du Guémon et particulièrement Duékoué, ont connu les affres de la crise postélectorale de 2010-2011 à l’intérieur du pays, plus qu’ailleurs. Alors qu’il était attendu sur le terrain, il a préféré recevoir cette population militante, loin du théâtre des opérations. Ci-dessous son intervention.
“(…) Des morts, des morts, des morts. Ce que nous devons rechercher , c’est la fin de ce cycle de morts politiques. On doit pouvoir faire la politique sans qu’il n’y ait de morts. C’est pourtant facile à comprendre mais beaucoup ne le comprennent pas. Le coûte que coûte n’existe pas en politique.”
<<Chers amis, je voudrais d’abord saluer les chefs de village qui sont là. Nous sommes à Mama et Mama est un petit village. Nous faisons partie d’un ensemble de 7 villages et chaque fois qu’il y a une circonstance, nous nous réunissons tous ensemble. Nous sommes les Blouga. Je voudrais saluer tous les chefs de ces villages qui sont réunis et à qui j’impose toujours des sacrifices parce que quand je suis là, il y a des gens qui viennent. Ayahooo, Ayahooo. Je voudrais aussi saluer les chefs de terre.
Mais aujourd’hui, c’est le jour tant attendu. C’est la visite des Wê. Je vous salue ! Moi j’en ai une à la maison, c’est Viviane. J’en ai une qui est en permanence à la maison, c’est la femme de mon fils donc j’ai du Wê chez moi. Mais vous tous, du Guémon et du Cavally, je suis heureux de vous voir mais avant de parler, compte tenu de ce que vous avez souffert, je demande que nous nous levons tous pour observer une minute de silence, en mémoire de tous ceux qui sont morts. (1 minute observée) Je vous remercie !
𝗔𝘂𝗷𝗼𝘂𝗿𝗱’𝗵𝘂𝗶, 𝗹𝗲 𝗱𝗶𝘀𝗰𝗼𝘂𝗿𝘀 𝗽𝗿𝗶𝗻𝗰𝗶𝗽𝗮𝗹 𝗮 𝗲́𝘁𝗲́ 𝗱𝗶𝘁 𝗮𝘂 𝗻𝗼𝗺 𝗱𝗲𝘀 𝗪𝗲̂ 𝗽𝗮𝗿 𝗛𝘂𝗯𝗲𝗿𝘁 𝗢𝘂𝗹𝗮𝘆𝗲. 𝗝𝗲 𝘀𝘂𝗶𝘀 𝘃𝗲𝗻𝘂 𝘃𝗼𝘂𝘀 𝗲́𝗰𝗼𝘂𝘁𝗲𝗿, 𝗠𝗮𝗶𝘀 𝗷𝗲 𝘃𝗶𝗲𝗻𝗱𝗿𝗮𝗶 𝗲𝗻 𝗽𝗮𝘆𝘀 𝗪𝗲̂ ! (𝗔𝗽𝗽𝗹𝗮𝘂𝗱𝗶𝘀𝘀𝗲𝗺𝗲𝗻𝘁𝘀) 𝗝𝗲 𝘃𝗶𝗲𝗻𝗱𝗿𝗮𝗶 𝗲𝗻 𝗽𝗮𝘆𝘀 𝗪𝗲̂ 𝗽𝗼𝘂𝗿 𝘃𝗼𝘂𝘀 𝘃𝗼𝗶𝗿.
Vous savez, ce pays wê est un pays martyre. En 2005 déjà, quand j’étais aux affaires, j’étais en Angola, je partais pour le Rwanda, quand on m’a annoncé que des massacres avaient eu lieu à Duékoué. Je suis revenu, j’ai été obligé de prendre des mesures exceptionnelles : J’ai nommé une administration militaire à Duékoué, Guiglo, Taï, Bloléquin pour que la force s’oppose à la force. J’ai mis à la disposition des administrateurs militaires, les éléments de la gendarmerie de Toroguhé et j’ai nommé au dessus d’eux tous un administrateur militaire, qui était d’ailleurs un wê, fils du pays. Ça a eu le temps de calmer les choses. C’est en imitation à cette administration militarisée que j’ai créé, à Abidjan, le CECOS que j’avais confié à Guiai BI Poin parce qu’il était Directeur de l’Ecole de Gendarmerie et donc il disposait d’hommes, de troupes, pour faire face à la délinquance à Abidjan.
ON DOIT POUVOIR FAIRE LA POLITIQUE SANS QU’IL Y AI DES MORTS . C’EST POURTANT FACILE MAIS BEAUCOUP NE LE COMPRENNENT PAS.
Après ça, il y a eu les événements de 2010-2011 où ce peuple là encore a payé un grand prix. Des morts, des morts, des morts. Ce que nous devons rechercher , c’est la fin de ce cycle de morts politiques. On doit pouvoir faire la politique sans qu’il n’y ait de morts. C’est pourtant facile à comprendre mais beaucoup ne le comprennent pas. Le coûte que coûte n’existe pas en politique. Et ce n’est pas une question de partis politiques. Nous sommes ici aujourd’hui, il y a des amis, des camarades du PDCI-RDA avec nous, et puis dans cette vaste assemblée, je suis sûr qu’il y a du tout. Donc ce n’est pas une question de partis politiques, c’est une question d’abandonner l’idée du coûte que coûte. Il faut abandonner l’idée du coûte que coûte. Si on ne m’a pas élu, on ne m’a pas élu ! Si on m’a élu, on m’a élu ! Mais si on a élu l’autre, il faut que je sache qu’on a élu l’autre !
ON DOIT SAVOIR POURQUOI IL Y A EU DE MORT ! PARCE QUE QUAND ON N’EXPLIQUE PAS POURQUOI IL Y A DES MORTS QUELQUE PART, ON NE PEUT PAS ARRÊTER LE CYCLE DE VIOLENCE.
Oulaye Hubert, je vous avais demandé de faire des études sur tout ce qui est arrivé dans le pays wê, continuez à aller jusqu’au bout ! Allez jusqu’ au bout ! Je le demande, ce n’est pas parce que les wê sont mes parents, mais c’est parce que c’est la Côte d’Ivoire et tout ce qui arrive en Côte d’Ivoire, on doit savoir pourquoi cela est arrivé. Dans le livre que j’ai publié en 1983, j’ai expliqué pourquoi il y avait eu le problème du Sanwi, j’ai expliqué pourquoi il y’avait eu le problème du Guébié, j’ai expliqué pourquoi à Séguéla, il y avait eu le problème de Sekou Sanogo, parce que quand on n’explique pas pourquoi il y a des morts quelque part, on ne peut pas arrêter le cycle de violence qui entraîne les morts. Donc il faut réfléchir, il faut étudier, toujours étudier et encore étudier.
IL NE SUFFIT PAS DE DIRE , NOUS LES WÊ ON NOUS A TUÉ. NON NON NON . UN ÊTRE HUMAIN QU’ON TUE, ON DOIT EXPLIQUER POURQUOI ON L’A TUÉ.
Peuple wê, Yako ! Yako mes parents ! Yako mes pères ! Yako mes sœurs ! Je vous salue ! Mais les solutions sont encore devant, il faut qu’on cherche les solutions et qu’on les trouve. Il faut qu’on les cherche et qu’on les trouve. Il ne suffit pas de dire, Oui nous les wê on nous a tué, non, non non non. Un être humain qu’on tue, on doit expliquer pourquoi on l’a tué. On doit expliquer pourquoi on l’a tué, pourquoi il est mort. Donc je vous salue pour votre bravoure.
Je vous salue tout simplement parce que vous êtes venus me saluer mais vous vous êtes dans votre rôle de parents, moi mon rôle d’homme politique c’est de chercher ce qui nous fait agir, ce qui fait que les hommes posent des actes graves. Pourquoi ? Pour un poste ? Je vais faire tuer ! Pourquoi ? Ce pourquoi là doit trouver explications. Pour le moment, nous n’avons que nos larmes pour pleurer, nos yeux pour pleurer, mais on ne va pas passer toute la vie à pleurer. À un moment donné, il faut que ça s’arrête.
J’appelle tout le monde à prendre son sang froid et à s’asseoir et à réfléchir. Moi un moment, je me suis dit, les Wê ont beaucoup de forêts donc les gens vont les attaquer pour prendre leurs forêts. Pour prendre les caféiers, les cacaoyers, donc les gens les attaquent. Peut être que c’est ce qui explique ça. Mais si c’est ça c’est grave ! Si c’est ça, c’est grave, il faut encore réfléchir. Et je continue de réfléchir.
𝗖𝗵𝗲𝗿𝘀 𝗽𝗮𝗿𝗲𝗻𝘁𝘀, 𝗔𝘀𝘀𝗲̂𝗵 ! 𝗝𝗲 𝗺𝗲 𝗱𝗲́𝗯𝗿𝗼𝘂𝗶𝗹𝗹𝗲 𝘂𝗻 𝗽𝗲𝘂 (𝗥𝗶𝗿𝗲𝘀). 𝗝𝗲 𝗺𝗲 𝗱𝗲́𝗯𝗿𝗼𝘂𝗶𝗹𝗹𝗲 𝘂𝗻 𝗽𝗲𝘂. 𝗝𝗲 𝘃𝗼𝘂𝘀 𝘀𝗮𝗹𝘂𝗲 𝗽𝗮𝗿𝗰𝗲 𝗾𝘂𝗲 𝘃𝗼𝘂𝘀 𝗲̂𝘁𝗲𝘀 𝘃𝗲𝗻𝘂𝘀 𝗱𝗲 𝗹𝗼𝗶𝗻 𝗽𝗼𝘂𝗿 𝗺𝗲 𝘀𝗮𝗹𝘂𝗲𝗿. 𝗘𝘁 𝗷𝗲 𝘀𝘂𝗶𝘀 𝗵𝗲𝘂𝗿𝗲𝘂𝘅 𝗱𝗲 𝘃𝗼𝘁𝗿𝗲 𝘃𝗶𝘀𝗶𝘁𝗲 ! 𝗝’𝗮𝗿𝗿𝗶𝘃𝗲 ! 𝗝’𝗮𝗿𝗿𝗶𝘃𝗲 ! 𝗢𝗻 𝘃𝗮 𝘃𝗶𝘀𝗶𝘁𝗲𝗿 𝘁𝗼𝘂𝘀 𝗹𝗲𝘀 𝗱𝗲́𝗽𝗮𝗿𝘁𝗲𝗺𝗲𝗻𝘁𝘀, 𝗼𝗻 𝘃𝗮 𝗱𝗶𝘀𝗰𝘂𝘁𝗲𝗿 𝘀𝘂𝗿𝘁𝗼𝘂𝘁, 𝗱𝗶𝘀𝗰𝘂𝘁𝗲𝗿, 𝗱𝗶𝘀𝗰𝘂𝘁𝗲𝗿, 𝗲́𝗰𝗼𝘂𝘁𝗲𝗿. 𝗝𝗲 𝘃𝗮𝗶𝘀 𝘃𝗼𝘂𝘀 𝗲́𝗰𝗼𝘂𝘁𝗲𝗿.
PÈRE DOUÉ BERTIN
Il y a un prêtre qui est originaire de Duékoué, je ne sais pas si quelqu’un se souvient de lui, Doué Bertin. C’est un monsieur qui est très brave. J’étais au séminaire avec lui. Lui il revenait de la guerre d’Algérie et quand il est arrivé en Côte d’Ivoire, il avait une seule idée, il voulait être Prêtre. Il était âgé et on lui a demandé s’il voulait être prêtre, il a dit Oui. Et il a repris ses études du Cours Élémentaire jusqu’au Grand Séminaire. Et je l’ai perdu de vue puisque moi, j’avais quitté le séminaire. Un jour, je faisais une tournée politique et puis je le retrouve avec sa soutane. Nous étions tellement heureux. Si vous partez, dites lui que je le salue et que j’ai les meilleurs souvenirs de lui, parce que chaque fois, en prison à la Haye ou en Belgique, je voyais les images des tueries de Duékoué, je le voyais, il était toujours là en train de chercher à dégager les morts, à repérer les puits où les gens avaient jeté les corps. Il a beaucoup fait pour que les morts aient une sépulture. Bertin, dites lui que je le salue et que je garde de très bons souvenirs de lui. Je l’ai vu à l’œuvre, marchant de fosses communes à fosses communes, je l’ai vu secourir les gens.
Et puis, peuple wê, vous avez une grande richesse, la forêt. Et quand je suis allé en 2005, j’ai été ahuri de voir le nombre d’allochtones et d’étrangers qui étaient dans ces forêts. Parce qu’on les avait sorti pour les regrouper à la Préfecture, à la Mairie. J’étais étonné. Hubert, il faut continuer de creuser.
Chers frères, chères sœurs, la route est longue, je suis heureux de vous voir. Mais je suis aussi obligé de tenir compte du fait que la route est longue. Vous avez un fleuve à traverser, heureusement qu’il y a des ponts maintenant (rires). Je me dois de vous libérer pour que vous puissiez partir le plus tôt possible pour arriver dans vos villages le plus tôt possible.
Je salue tous ceux qui ne sont pas venus, qui auraient voulu venir mais qui n’ont pas eu les moyens. Et puis je salue aussi tous ceux à qui on a dit de ne pas venir parce que ça allait faire trop de monde (rires).
Et vous êtes venus voir si c’est effectivement moi qui suis venu, c’est bien moi qui suis venu (Applaudissements). Vous m”avez vu, je vous ai vu, mais vous m’avez fait beaucoup de dons. On dit jamais qu’il y a trop de dons parce que les biens qu’on vous offre sont toujours les biens de DIEU. Donc on dit jamais qu’il y a trop de dons mais vous m’avez fait beaucoup de dons. Je vous remercie ! Ya viande, le riz, même la sauce vous m’avez donné. Les béliers, tout ça ! Mes Chefs, kiffy, on va manger hein (rires), tout ça on va manger (rires). Ils nous ont apporté à manger, merci beaucoup, merci beaucoup !
Je voudrais saluer tous les alliés surtout ceux du PDCI qui sont avec nous. Dites mes Merci au Président BÉDIÉ. Il y a des fois où on est là et puis dans nos régions, on dit lui là il est FPI, lui là il est PDCI hein, il est trop brave mais or nos parents sont tous les mêmes, nos coutumes sont les mêmes. On peut même s’asseoir, tu peux lui dire, allons tu vas m’accompagner au bandji, il va croire que tu veux l’empoisonner, il va croire que tu vas l’empoisonner or c’est autour du bandji que vous pourrez discuter des différends donc je vous remercie d’être venus. Je remercie aussi tous les miens, tous mes frères, tous mes camarades qui sont venus, tous les bétés qui sont venus des 7 villages de Blouga et même d’ailleurs qui sont venus m’aider à accueillir mes étrangers. Je voudrais les remercier aussi.
Ayahoo, Ayahoo et vous, que DIEU vous bénisse ! Les Wê, que DIEU vous bénisse ! Que DIEU vous garde en vie ! Que DIEU vous raccompagne dans vos villages tranquillement et que chacun dorme chez lui ce soir paisiblement ! Je vous remercie ! >>
𝗦𝗘𝗥𝗩𝗜𝗖𝗘 𝗖𝗢𝗠𝗠𝗨𝗡𝗜𝗖𝗔𝗧𝗜𝗢𝗡.