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Hygiène menstruelle : « Nous travaillons à la sensibilisation des hommes et femmes », Patricia KANGA (INTERVIEW)

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Partout dans le monde, est célébrée ce 28 mai la journée mondiale de l’hygiène menstruelle. Comment les jeunes filles et femmes arrivent à supporter. De son côté, à travers sa plateforme sur les réseaux sociaux « la pause des dames, Patricia Kanga veut offrir un espace de discussions sans tabous aux femmes et aux jeunes filles en milieu professionnelle et estudiantin sur toutes les questions liées aux menstruations. Interview

Quelle est votre compréhension de l’hygiène menstruelle?

Alors, pour moi l’hygiène menstruelle c’est l’ensemble des éléments et dispositions qui entrent en compte pour gérer efficacement la période des menstrues.

Comment êtes vous arrivée à vous approprier ce combat de l’hygiène menstruelle?

Tout est parti d’un constat personnel dans un premier temps, ensuite un constat général. En réalité aussi loin dans mes souvenirs je ne me rappelle pas avoir été préparé à l’arrivée des menstrues et lorsqu’elles sont arrivées c’était la panique totale. Les douleurs m’ont fait vraiment redouter cette période.

En regardant autour de moi, je me suis rendue compte que plusieurs jeunes filles et dames traversaient cette période comme une véritable épreuve imposée par mère nature.

Partagé entre les douleurs, le côté tabou de la chose, l’absence par moments de lieux appropriés pour changer ou jeter sa serviette usée m’ont interpellé.

Quel est votre domaine d’intervention ?

A ce stade de notre démarche nous travaillons à la sensibilisation de tous sans exception (hommes, femmes, jeunes filles etc).

Par ailleurs, nous travaillons surtout à offrir un espace de discussions sans tabous aux femmes et aux jeunes filles en milieu professionnelle et estudiantin sur toutes les questions liées aux menstruations à travers le concept : « La Pause des Dames ».

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Quel bilan faites-vous jusqu’à maintenant du comportement des femmes face à l’arrivée de leurs menstrues

Bilan ? Non, je dirai plutôt mon observation et c’est bien dommage car pour la majorité, c’est un vrai supplice. Le changement d’humeur, la fièvre, les douleurs au bas du dos, les douleurs des seins, c’est un vrai parcours du combattant pour plusieurs.

Toutefois, il est important de noter que pour certaines femmes c’est un long fleuve tranquille.

 

 Comment les soins pour les menstruations sont-ils perçus ici en Côte d’Ivoire selon vous? Sont-ils discutés ou stigmatisés?

Rire, plusieurs personnes considèrent malheureusement les règles douloureuses comme étant un état normal de la femme, elle doit donc supporter les douleurs sans se plaindre. J’ai même déjà entendu quelqu’un me poser la question suivante sans aucune gêne : « as-tu déjà vu le sang sortir du corps d’un être humain sans douleur ? »

Et je pense qu’à force d’entendre ce genre de parole, une bonne partie des femmes finit par accepter cette douleur menstruelle sans même chercher à consulter leur gynécologue ou un agent de santé. La plupart du temps, c’est vers la médecine traditionnelle que certaines préfèrent se tourner. Et là encore vous entendrez dire que les règles douloureuses ne se soignent pas au risque de contracter une grossesse. Rire

Enfin, je pense qu’avec la communication sur l’endométriose, les femmes prennent de plus en plus conscience de la nécessité de consulter lorsque les douleurs deviennent vraiment insupportables.

 

A votre niveau, quelles sont les initiatives mises en place pour aider les femmes à maintenir leur hygiène menstruelle ?

De façon concrète nous faisons beaucoup de sensibilisation via les Réseaux Sociaux et souhaitons organiser cette année un don de protection périodique aux femmes détenues à la MACA dans la continuité de la Journée Mondiale de l’Hygiène Menstruelle

 

Quelles sont les barrières à l’accès aux mesures d’hygiène menstruelle pour les femmes dans votre communauté?

D’une femme à une autre les difficultés varient. A l’instar du faible revenu financier, il est primordial de mettre l’accent sur l’absence ou, l’inaccessibilité des toilettes, parfois quand il existe des toilettes celles-ci sont impraticables. Ainsi, que le manque d’eau et de savon pour se laver aussi souvent que nécessaire.

 

 Quelle est l’importance de l’accès à des options d’hygiène menstruelle durables pour les femmes dans les communautés rurales?

Je crois pour ma part que c’est une belle complémentarité. Le plus important c’est que la femme ou la jeune fille en période de menstruation ne soit pas en situation de précarité.

Avoir à porter des mains des solutions de gestion des menstrues réutilisables et à moindre coût est une belle opportunité pour les personnes qui n’ont pas de grand moyen financier mais aussi pour celles qui s’y sentent plus à l’aise.

Le plus important c’est se trouver un confort dans l’inconfort.

 

Comment pensez-vous que les mesures d’hygiène menstruelle peuvent être améliorées dans les écoles et les lieux de travail?

Il conviendra simplement de :

  • Faire beaucoup de sensibilisation dans les écoles
  • Sensibiliser les jeunes garçons afin d’éviter toute forme de moqueries,
  • Faire comprendre aux jeunes filles que les règles n’ont rien de tabou et de honteux
  • Mettre dans les écoles des distributeurs de protections hygiéniques afin d’apporter un soulagement aux filles qui ne sont pas en mesure de s’en procurer
  • Rendre les toilettes au sein des écoles et bureaux fonctionnels
  • Faire comprendre la nécessité de congé menstruel aux politiques et dirigeants d’entreprises
  • Faciliter l’accès aux services de santé

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Comment pouvons-nous sensibiliser davantage sur cette question et encourager les actions pour garantir un accès équitable à l’hygiène menstruelle pour toutes les femmes ?

Il faut dans un premier temps une prise de conscience de tous. Au niveau de la cellule familiale faut que les mamans préparent leur fille et parlent à leur garçon.

Faudrait aussi que nos politiques voient la nécessité de prendre des décisions visant à lutter contre la précarité menstruelle comme c’est le cas avec les congés menstruels en Zambie depuis 2015, en Espagne depuis cette année 2023, ainsi qu’au Japon et en Corée du sud.

Aussi, penser à subventionner les protections hygiéniques pour certaines cibles serait une belle avancée. Enfin, seul, entre amis, entre collègues nous pouvons penser à organiser de façon continue des collectes de protections.

 

Réalisée par Sandra KOHET